Autorisée en 2005 pour une durée de 5 ans, une expérimentation menée par l'INRA dans le vignoble de Colmar vient d'être la cible des activistes anti-OGM. Celle-ci visait à tester en milieu naturel la résistance de porte-greffes transgéniques au "court-noué". Ce virus transmis de cep en cep par un ver du sol touche, selon l'INRA, 60% des vignes françaises, provoquant leur mort et rendant le sol impropre à la viticulture.
Les membres de l'INRA était particulièrement choqué et remonté par cet arrachage, qui s'apparente selon eux à une atteinte à la liberté de chercher.
Marion Guillou, présidente de l'INRA: "On voulait savoir si un bois de vigne génétiquement modifié pouvait ralentir le virus. En laboratoire, cela marchait. L'essai en plein champ devait aussi nous renseigner sur l'impact environnemental. Mais avec ce saccage, impossible de conclure, ce sont 8 ans de travail qui sont piétinés!"
Dimanche en effet, 62 faucheurs volontaires ont arraché les 70 pieds de vigne, avant de transmettre leurs noms à la police et d'appeler les journalistes.
Mme Guillou fait part de sa totale incompréhension: "Notre essai était transparent et n'avait aucune vocation commerciale! Il répondait aux condition drastiques posées par le comité de suivi local où siègent des associations écologistes comme Alsace Nature, des élus locaux, des consommateurs. Pour éviter tout risque de dissémination des gènes, les porte-greffes ne produisaient ni fleurs ni fruits et une bâche installée dans le sol retenait les vers vecteurs du virus."
Autre son de cloche du côté des faucheurs, pour qui cette expérimentation est inaboutie puisque les fleurs ayant justement été supprimées, l'essai ne peut donner aucun résultat scientifique valable sur les risques de transmission de l'organisme génétiquement modifié au raisin et au vin.
Autre argument: les pratiques bio permettrait déja selon eux de combattre le court-noué.
Enfin (surtout), ils voient dans cette expérience le premier pas d'une démarche commerciale visant à imposer les cultures OGM. Accusation qui a le don de particulièrement énerver la présidente de l'INRA: "L'INRA n'est ni pour, ni contre les OGM! Nous cherchons à répondre à des questions, la transgénèse n'est qu'une des voies de recherche explorée face au court-noué. Nous explorons aussi la lutte biologique, comme la mise en jachère des terres en alternance avec les vignes et l'utilisation de plantes nématicides (= anti vers)."
Les faucheurs ont reçu le soutien de la confédération paysanne ainsi que du sénateur vert du Haut-Rhin, Jacques Muller. Pour tous, cet arrachage est un geste de désobéisance civile, et se veut avant tout symbolique du combat mené contre le développement de la manipulation génétique dans l'agriculture.
Jacuqes Muller: "Ce qui est en jeu, c'est l'avenir de l'agriculture: ou on continue dans l'impasse productiviste en accroissant la dépendance à l'égard des multinationales de l'agrochimie et de la génétique, ou on opte pour une agriculture intégrée s'appuyant sur des mécanismes naturels biologiques".
Le sénateur a participé aux discussions sur les lois Grenelle, et selon lui l'agriculture intégrée fait face à un virulent lobby pro-OGM, au Parlement comme dans les institutions européennes.
En septembre 2009, un franc-tireur anti-OGM alsacien avait déja sectionné des plants. Selon l'INRA, ce nouvel arrachage représente un préjudice de prés d'un million d'euros.
