Aujourd'hui, c'est Yvonne Hegoburu (Domaine de Souch), grande dame du Sud Ouest, qui nous donne ses réponses (très intéressantes) à ces quelques questions destinées, à quelques jours de la fête des mères, à mieux connaître les vigneronnes de la Contre-Etiquette.
1 - Quel est votre parcours? Comment vous est venue l'envie et comment êtes-vous devenue vigneronne?
"J’ai 58 ans quand mon mari décède. Il était journaliste, j’étais secrétaire de direction. Rien à voir avec le vin. Sauf que mon mari était un amateur éclairé et m’avait appris à déguster quelques bonnes bouteilles. Il avait consulté les archives départementales et appris que la propriété dont nous avions fait l’acquisition en 1968, était jusqu’en 1940 réputée pour la qualité de ses vins. Pendant la guerre, et encore après, quand leurs maris étaient prisonniers, les femmes avaient abandonné la vigne au bénéfice d’autres cultures qui permettaient de nourrir leurs familles.
Quand nous avons acheté cette terre en 1968, il n’y avait plus de trace de vigne. Moi, je rêvais déjà d’une plantation, mais devant le coût de l’investissement, nous avions abandonné le projet.
Pour ne pas être dans l’obligation de quitter cette maison et ce lieu, quand je me suis retrouvée seule, j’ai imaginé que je pouvais réaliser ce rêve qui me tenait à cœur depuis longtemps. Je plante six hectares sur les vingt de la propriété. J’aménage les terres les plus pentues en terrasses. Les treize mille piquets sont taillés dans les bois du Domaine. Je choisis bien sûr les cépages traditionnels :
Petit Manseng (70 %). – Gros Manseng (20 %) – Courbu (10 %)
Je commande les meilleurs matériels. Egrappoirs, pressoir pneumatique à membrane, six cuves Inox thermorégulées, des barriques neuves, … Bref, beaucoup d’endettement."
2 - Le milieu du vin vous semble-t-il macho? Est-ce plus difficile pour une femme?
"Pour moi, le milieu du
vin n’est pas « macho » en ce qui me concerne. J’ai
été très gentiment accueillie, accompagnée, conseillée par
beaucoup de viticulteurs. Je pense qu’être une femme est au
contraire un atout, et pour une vieille dame particulièrement."
3 - Pensez-vous que les vins élaborés par des femmes ont une particularité? Dans la conception d'un vin, une vigneronne possède-t-elle un petit plus, une sensibilité particulière, que ne possèdent pas ses collègues masculins?
"Je pense que les vins élaborés par les femmes ont effectivement un petit plus, une sensibilité particulière.
En ce qui me concerne, j’ai la sensation, et je le dis à mes clients, d’avoir un enfant tous les ans, je surveille, je materne, j’accompagne et le jour de la mise en bouteilles, je ne l’abandonne pas et je parle de lui avec passion... Comme pour les enfants, ils sont tous différents ; certains me donnent de la joie, d’autres, de la peine, et ils sont au bout de 25 ans aussi présents dans ma mémoire que ceux qui m’ont comblés. Vous parlez de petits plus. Pour moi, c’est ce côté maternel qui nous fait être plus à l’écoute, et plus confiante de leur devenir, peut – être, que les hommes. Nous sommes aussi plus rigoureuses, plus instinctives et plus passionnées. Donc, nos vins sont plus « pointus ».
4 - Parmi vos vins, lequel recommandez-vous plus particulièrement à votre clientèle féminine?
Votre question tombe bien
cette année. Mes vins moelleux, la « Cuvée du Domaine »
et la Cuvée « Marie Kattalin » 2007, sont joyeux,
transparents, « biens faits », très prometteurs, et
actuellement en pleine effervescence, presque un peu "fous ».
Leur jeunesse et leur fougue désordonnée, vont plaire aux femmes,
plus en recherche d’émotions et encore en devenir...
Merci à Mme Hegoburu et à Jeanne Boyrie.
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