Pour le domaine de la Pinte, sortez d’Arbois sur la route de Lyon. A deux ou trois kilomètres, sur votre gauche, une route serpente à flanc de coteau au milieu des vignes. La route de la Pinte ?
Bien sûr, impossible de se tromper : un muret sur le bord de la route porte les couleurs et la devise du domaine : Plante beau, cueille bon, pinte bien… Dans une région rude, tant par son climat que la piètre renommée de ces vins (et oui, le Jura ne jouit pas de la renommée de la voisine Bourgogne !), la Pinte est une institution reconnue. La visite du domaine confirme la teneur des propos : qualité et engagement sont des valeurs qui priment. Ces valeurs, on les doit à la famille Martin, qui créa le domaine aux alentours des années 50 et puis à Philippe Châtillon et son épouse qui l’exploitent depuis 20 ans dans l’esprit des créateurs, avec qui ils ont tissé des liens étroits dans l’amour du vin.
De Philippe Châtillon, si on ne dit pas qu’il est artiste, on peut cependant lui reconnaître des talents d’agitateur. Cet ancien élève d’une grande école a renoncé à un parcours tout tracé d’ingénieur pour vivre la passion du vin. Il faut dire que déjà en 68 le trublion avait choisi son camp : celui de la libre expression… Après 3 années réussies en tant que maître de chai dans un domaine bourguignon, la famille Martin lui propose de diriger le domaine de la Pinte. Dès lors naît une union jamais démentie malgré des propositions attrayantes. De cet engagement à la terre de la Pinte nous retiendrons la qualité sans faille des produits de la gamme.
Facilement reconnaissable à ses bigotes, Philippe Châtillon fait partie des gens qui aiment leur métier et font partager leur passion : A la Pinte, l’été, on peut assister dans les immenses et magnifiques caves voûtées à des concerts de violoncelle, ou participer à des dégustations originales où le vin jaune croise les cacaos du meilleur chocolatier de France établi à Arbois.
Autre figure de style, voici un extrait du livre édité par Philippe Châtillon à la gloire de la Pinte :
« - Les choses de la vigne -
Sans doute de l’inconscience
De la persévérance
Un soupçon d’insolence
Tant pis pour les convenances
Un petit brin de folie
Et de la science aussi
Toujours de la patience
De l’audace tenace
Enfin de l’expérience
Plus de travail qu’on ne pense
Ainsi naissent les grandes choses
Comme les plus petites
Ainsi va le raisin
Du bon grain au grand vin
Ainsi font les vrais gens
Essayeurs et faiseurs, ils osent
Parfois même nous irritent
Jamais ne laissent indifférent
Et ça fait toute la différence ! »
Mais promenons nous au domaine, car il a beaucoup a montré…de la cave au grenier. En extérieur, 
le domaine de la Pinte bénéficie d’une belle vue dominant les environs et d’un cadre naturel verdoyant loin de tous voisins, et au milieu des vignes du domaine (vieilles de 50 ans en moyenne.) La bâtisse est un modèle architectural pour la conservation des vins et notamment le vin jaune qui se doit de reposer en cave 7 années durant dans la plus grande quiétude que l’on parle de bruit, de secousses ou de température. La visite commence cependant par un zoom sur une autre star jurassienne, le vin de paille, dont un passage au grenier permet de mieux comprendre la fabrication. 
Dansun espace grillagé, protégé des nuisibles, sèchent les grappes des premiers raisins de la vendange, ceux sélectionnés pour le fameux vin liquoreux. Sur les côtés de l’allée centrale, les fameuses claies recouvertes de paille sur lesquelles repose également des raisins, d’autres milliers de grappes pendent au dessus de l’étroite allée de sorte que, de septembre à mars, cette salle se transforme en une surprenant grotte végétale. L’odeur douce et sucrée de l’endroit évoque déjà ce que sera ce nectar concentré. Pour produire 8 litresde vin de paille 100 kgde raisin sont nécessaires. A titre de comparaison pour une quantité égale, 80 litresd’un vin traditionnel peuvent être produits.
Après le côté magique du passage au grenier, il est difficile d’imaginer que les caves puissent amener aussi leur lot de sensations. Or ici, un autre vin se prépare tout aussi tranquillement, c’est le vin jaune. 
Pourtant lorsque l’on y pénètre dans la pénombre, on ne distingue pas le fond, là-bas, derrière des rangées de foudres et de fûts. Et lorsque Philippe Châtillon allume la salle, c’est pour faire découvrir une cave voûtée magnifiquement mise en lumière d’une cinquantaine de mètres de long et près de 20 m de large. Et pourtant ici ne sont présents que la moitié des vins du domaine. Une cave, identique en surface, est située à gauche de celle à laquelle on accède. La seconde ne se visite pas, ou peu, car elle renferme le fameux vin jaune tiré du cépage traditionnel jurassien : le savagnin. Ce vin typique nécessite le calme le plus absolue pour ne pas virer au cours des 7 ans de vieillissement en une sorte de vinaigre imbuvable.
Toutefois, pour permettre à ses visiteurs de comprendre la fermentation du vin jaune, Philippe Châtillon a eu l’ingénieuse idée de remplacer la paroi en bois d’un des fûts par une vitre de plexiglas. 
Ainsi peut-on observer à loisir la couche de levures qui se développe sur la surface du vin en formation. Cette couche de levure donne au
En défricheur invétéré, Philippe Châtillon est à l’origine de quelques vins inattendus :
Le « Grain de folie », est produit dans les conditions du vin jaune (7 années de fût) mais est bâtonné et ouillé pour donner un savagnin d’exception !
Philippe produit aussi occasionnellement, lors des très belles récoltes, le Rêve d’Automne, un vin de paille ultra concentré : 100 kg de raisin pour… 1 bouteille de 50 cl.
Mais le plus surprenant des vins de la Pinte est sans doute le Melon à queue rouge. Il s’agit d’un Chardonnay d’autrefois aujourd’hui quasiment disparu. De ce cépage Philippe Chatillon fait un vin comparable à certains grands blancs de Bourgogne... Intéressant pour épater les amis !
Tous ces vins d’exception ne doivent pas occulter pour autant les autres cépages traditionnels du Jura notamment en rouge. La carte des vins de la Pinte est impressionnante, avec plus de 20 produits tous bio et de grande qualité… Si le Jura est fameux pour ses vins blancs, les cépages rouges de la région, trousseau et poulsard sont également remarquables de typicité.
Plante beau, cueille bon, pinte bien… La Pinte est sans aucun doute un domaine qui représente fièrement son terroir, le Jura.
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